Ah, ce plat, c’est toute une histoire d’amour et de parfums. Il est né un soir d’automne, quand le vent commençait à mordiller les feuilles et que j’avais besoin d’un plat réconfortant, généreux, mais vibrant. C’est là que j’ai ouvert mon petit coffret aux merveilles du monde : ma boîte à épices, où dorment les trésors du site Les Épices Curieuses. C’est un peu comme un cabinet de curiosités olfactives, chaque pot racontant un bout du monde.
Ce curry de légumes rôtis est une ode à deux épices envoûtantes : la cardamome noire et les graines de fenugrec grillées. Chacune a son histoire, sa mémoire, son feu.
La cardamome noire, c’est un souffle venu tout droit des forêts humides de l’Himalaya. Moins connue que sa sœur verte, elle en impose avec ses grosses gousses ridées couleur chocolat. Lorsqu’on l’ouvre — et attention, toujours la fendre légèrement avant de la cuisiner — elle libère une fumée qui évoque le feu de bois, le thé fumé, la terre après la pluie. En Inde, on l’utilise dans les plats longs à mijoter, pour sa capacité à tisser les saveurs entre elles, comme un chef d’orchestre discret mais essentiel.
Quant aux graines de fenugrec, elles viennent nous parler du Levant, des marchés d’épices parfumés où le soleil chauffe les étals. Elles ont cette odeur presque sauvage, boisée, un peu noix, et puis, quand on les grille à sec dans une poêle chaude, elles se métamorphosent : leur amertume se voile d’un parfum biscuité, presque sucré. Elles donnent au curry son ancrage terrestre, profond.
Voici donc la recette, à faire un lundi triste ou un samedi festif, seule ou pour nourrir ceux qu’on aime.
Ingrédients (pour 4 personnes)
- 2 patates douces coupées en dés
- 2 carottes coupées en biseaux
- 1 brocoli coupé en fleurettes
- 1 oignon rouge émincé
- 2 c. à soupe d’huile de coco ou d’huile d’olive
- 2 gousses d’ail hachées
- 1 morceau de gingembre frais râpé (2 cm)
- 1 c. à café de graines de fenugrec (grillées à sec)
- 2 gousses de cardamome noire fendues
- 1 c. à café de cumin moulu
- ½ c. à café de curcuma (pour la chaleur dorée)
- 1 c. à soupe de pâte de tomate
- 40 cl de lait de coco
- 1 petite poignée de feuilles de coriandre fraîche
- Sel, poivre du moulin
Préparation
Fais préchauffer le four à 200°C. Dispose tes patates douces, carottes et brocolis sur une plaque, arrose-les d’un filet d’huile, saupoudre d’un peu de sel et enfourne-les 25 minutes. Tu veux qu’il y ait du croustillant, du caramel sur les bords. N’aie pas peur que ça dore un peu, ce sont ces coins brunis qui tiennent le secret de la profondeur.
Pendant que ça rôtit, fais chauffer une cocotte sur feu moyen. Grille rapidement les graines de fenugrec à sec, jusqu’à sentir leur arôme biscuité. Ajoute l’huile de coco, puis l’oignon rouge, l’ail, le gingembre et les gousses de cardamome noire fendues. Laisse revenir doucement, jusqu’à ce que l’oignon fonde et que les arômes montent comme une brume dorée.
Ajoute ensuite le cumin, le curcuma et la pâte de tomate. Fais revenir encore une minute pour que les épices « s’ouvrent », comme on dit — c’est-à-dire qu’elles libèrent leurs huiles et donnent tout leur éclat. Verse alors le lait de coco et laisse mijoter 10 minutes, le temps que tout s’embrasse et prenne le goût du soleil, ou du feu de bois là-haut dans l’Himalaya.
Enfin, ajoute les légumes rôtis dans la cocotte, mélange doucement, goûte et ajuste le sel. Parsème de coriandre fraîche juste avant de servir.
Astuces pour sublimer
- Texture : ajoute quelques pois chiches grillés pour du croquant, ou de petits morceaux de paneer (pour la version non-végétalienne) passés à la poêle.
- Variantes : remplace le brocoli par des épinards ou du chou kale en hiver, ajoute des petits pois pour une touche sucrée.
- Pour le sex-appeal final : un filet de yaourt végétal à la noix de cajou avec un trait de citron vert au moment de servir. Explosion assurée.
Version végétarienne (et véganisée)
Cette recette est déjà entièrement végétarienne, mais pour la rendre encore plus plant-based-roots-vibrante, ajoute du tofu grillé : le faire mariner 30 minutes dans un peu de sauce soja, gingembre et sirop d’érable, puis le saisir à la poêle jusqu’à ce qu’il soit croustillant à l’extérieur et moelleux dedans.
Servir ce plat, c’est comme offrir un conte épicé. Tu verras, autour de la table, les convives se taisent un instant au premier coup de fourchette. Parce que dans ce curry, il y a plus que des légumes et du lait de coco. Il y a les montagnes, les marchés, les mains qui cueillent, les gestes transmis, et un peu du cœur de celui qui le prépare.
Bon voyage culinaire, mon ami.